C’est l’histoire d’une guérison. Elle commence au plus mal, au plus fort de cette étrange maladie qui empêche de manger, jusqu’à en mourir : l’anorexie.
Delphine de Vigan l’a vécue. Elle le raconte dans ce qui a été son premier livre – publié sous un autre nom, à l’époque. Elle le raconte à la troisième personne du singulier. C’est donc l’histoire de Laure, qui n’est pas tout à fait Delphine de Vigan, tout en étant, peut-être, complètement elle…
Elle le raconte dans ce livre publié aujourd’hui sous son vrai nom, et en le lisant avec sa voix. Elle a cheminé, et ce livre a une histoire, que l’on peut découvrir dans une interview touchante, à la fin…
Mais pour l’instant, l’histoire commence avec une jeune femme qui n’arrive plus à se réchauffer, qui ne sait plus si elle a envie de vivre, et un médecin qui, pour la première fois, sait trouver des mots pour la comprendre…
« C’est à cause du froid qu’elle a accepté le rendez-vous. La première fois, quand il l’a appelée. Une voix inconnue, nasillarde, lui proposait de l’aide… »
Dans ce premier roman, on retrouve toute la sensibilité, toute la personnalité de la plume de Delphine de Vigan – que j’avais tellement aimée dans Rien ne s’oppose à la nuit.
Et on se laisse embarquer par sa voix, une voix qu’on écoute et qu’on ne peut plus lâcher. Une voix qui donne vie à ces jours d’hôpital, à ces voisines de chambre sympathiques, drôles ou terribles (ah, la voisine au peignoir… tout un festival !).
C’est un livre qui nous fait vivre de l’intérieur l’anorexie, avec les sentiments, les sensations, le côté médical… et aussi, toute cette vie qu’on aperçoit à la marge de l’hôpital : la famille qui déglingue, la solitude, le vertige de la tentation de replonger dans ce sentiment de liberté qu’apportait la maladie…
Je n’ai pas connu cette maladie personnellement, même si je me souviens d’une amie, quand nous étions étudiante, trop maigre, avec de trop grands yeux, dont on n’avait compris le malaise que le jour où elle avait été hospitalisée… Depuis, j’ai lu sur le sujet, j’ai regardé des documentaires… Ce livre-ci est particulièrement juste.
Delphine de Vigan sait trouver les mots. Qu’un écrivain puisse nous emmener sur ce chemin-là, c’est un cadeau unique pour comprendre un peu mieux. C’est ainsi que ce livre a eu toute une vie déjà, permettant de toucher parents, médecins, proches… pour mieux faire connaître la maladie.
Mais, au delà, ce récit de détresse et de vie qui revient peut tous nous toucher, quelle que soit notre histoire…
Un très beau texte, et un grand coup de cœur…
Pour écouter un extrait, c’est ici, sur le site de l’éditeur.
Et dans Bookmakers, le podcast d’Arte, une plongée dans l’univers de l’écrivain au travail… en trois épisodes.